Cinq questions à Mariam Karamoko, porteuse du projet photo Tradition’hair

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Mariam Karamoko, rédactrice du blog Santé vous belle nous présente Tradition’hair, un projet photographique qui met à l’honneur coiffures afro et cérémonies traditionnelles.

Article mis à jour le 1 mai 2021 par La rédaction

Mariam Karamoko, rédactrice du blog Santé vous belle nous présente Tradition’hair, un projet photographique qui met à l’honneur coiffures afro et cérémonies traditionnelles.

Biloa Magazine : Pouvez-vous présenter ainsi que votre blog Santé vous Belle ? 

Mariam Karamoko : Je suis Mariam Karamoko 27 ans, parisienne, et je tiens le blog Santé vous belle qui vise à valoriser la beauté, le bien-être et surtout le respect des peaux noires dans l’objectif de lutter contre la dépigmentation volontaire. A travers les articles que je publie, je propose aux femmes des alternatives naturelles pour prendre soin de leur peau. Je partage également des astuces liées aux soins capillaires car les femmes noires accordent beaucoup d’importance à l’entretien de leurs cheveux.

Biloa Magazine : Comment est née l’idée de ce projet photographique Tradition’hair?  

Mariam Karamoko : Je voulais organiser à la base un concours dans lequel des femmes posteraient des photos d’elles en bazin, un tissu que l’on porte lors de cérémonies traditionnelles, avec comme critère obligatoire de ne porter pas porter de rajouts. Puis, j’ai eu à rencontrer  Miguèle Serbin, fondatrice de la rencontre Nappy de France, lors d’un entretien collectif, et en voyant la photo d’une des candidates avec son afro, j’ai imaginé tout de suite cette dernière portant un joli bazin. C’est de là que j’ai décidé de réaliser Tradition’hair.

 "Le travaillement consiste à donner de l'argent à une personne (généralement un griot) qui fait votre éloge. Ce qui peut sembler être du gaspillage pour certains reste une manière pour les adeptes de marquer des points et de se faire un nom. La miss fait son farot. De toute façon c'est son argent. Elle le donne à qui elle veut..."
« Le travaillement consiste à donner de l’argent à une personne (généralement un griot) qui fait votre éloge. Ce qui peut sembler être du gaspillage pour certains reste une manière pour les adeptes de marquer des points et de se faire un nom.
La miss fait son farot. De toute façon c’est son argent. Elle le donne à qui elle veut… »

Biloa Magazine : Combien de personnes travaillent avec vous sur ce projet ?  

Mariam Karamoko : Après avoir contacté Alexandra Yao qui est photographe, j’ai fait appel trois partenaires, Daloba Guirassy qui vend des tenues en bazin et deux coiffeuses freelance, Rougui Bah et Aurélie Jacob qui vient de remporter le 1er prix au concours de coiffure sur locks au Salon Boucles d’Ebène.

Tradition'hair

Biloa Magazine : Quel(s) message(s) souhaitez-vous faire passer à travers ce projet ?  

Mariam Karamoko : On ne peut pas promouvoir la diversité en imposant des codes et Tradition’hair est une manière de promouvoir la diversité esthétique. A travers ces photos j’ai voulu mettre en avant une culture et par la même occasion, changer quelques codes de beauté en choisissant des modèles aux cheveux crépus. J’ai voulu pointer du doigt et de façon subtile ce paradoxe, les fêtes traditionnelles devraient être un lieu où la beauté africaine est valorisée sous toutes ses formes.  Voilà pourquoi sur les légendes associées aux photos, à aucun moment je n’utilise le terme de « nappy », pour ne pas faire de ces femmes aux cheveux naturels une communauté marginalisée.

"Le dimanche à Paris, c'est aussi le jour de mariage"
« Le dimanche à Paris, c’est aussi le jour de mariage »

Mais voilà dans les fêtes et cérémonies mandingues, c’est vraiment très rare de voir des mariées coiffées avec leurs cheveux crépus. Comme si cette texture de cheveu était inadaptée pour ce genre de cérémonie qui représente un lien vers nos origines. Prenons également exemple des élections de beauté des diasporas. Je n’ai pas encore vu de candidate  francophone avec des cheveux locksés. Pour celles qui ont des cheveux crépus, elles se retrouvent avec les cheveux lissés. J’en connais une seule, Juliette Rusin, candidate à Miss Côte d’Ivoire qui a défilé avec les cheveux courts et crépus lors de sa présélection.

"Un jour, je remporterai la couronne de miss car, quelle que soit la coiffure que je porte, je suis et reste une beauté d'Afrique"
« Un jour, je remporterai la couronne de miss car, quelle que soit la coiffure que je porte, je suis et reste une beauté d’Afrique »

Biloa Magazine : Quelques photos ont été publiées sur la page Facebook de Santé vous Belle, où pourrons-nous découvrir les autres photos? Envisagez-vous de faire une exposition prochainement ? 

Mariam Karamoko : Je suis en train d’entamer des démarches pour faire une exposition. Pour cette première série, je me suis inspirée des cérémonies mandingues, j’aimerais toucher d’autres cultures africaines, d’autres modes de vies pour avoir quelque chose de plus diversifiée.

 "S'habiller en bazin, c'est vouloir être classe, faire preuve d'élégance. Et pour être deux fois plus élégante, rien de mieux que de porter une coiffe ou attacher un foulard"
« S’habiller en bazin, c’est vouloir être classe, faire preuve d’élégance. Et pour être deux fois plus élégante, rien de mieux que de porter une coiffe ou attacher un foulard »

Biloa Magazine : Merci pour vos réponses, souhaitez-vous faire un dernier commentaire? 

Mariam Karamoko : Je tiens à préciser que ce projet ne vise surtout pas à opposer les filles défrisées et les filles aux cheveux naturels. Le but était de mettre en lumière ce qui reste souvent dans l’ombre. Même si chacune est libre de faire ce qui lui plaît sur ses cheveux, je considère le cheveu crépu comme un patrimoine génétique. Aucun défrisant à l’heure actuelle n’est capable de faire sorte que les racines deviennent lisses. C’est une identité esthétique à valoriser, et Tradition’hair prouve en images que porter des cheveux crépus dans une tenue traditionnelle en bazin est une belle combinaison qui fonctionne.

Site web : Santé vous belle

Crédits photo : © Tradition’hair par Santé vous belle / Chrisse Johnson